CR table ronde organisée à Toulouse le 8 avril 2025 sur le thème de la souveraineté numérique
La souveraineté numérique : sommes-nous réellement prêts à défendre nos intérêts ?
C’est la question cruciale qui anime la table ronde du CDRT organisée à Toulouse le 10 avril 2025, réunissant des acteurs reconnus pour aborder cette problématique devenue essentielle dans les stratégies d'entreprises et d'institutions.
Pierre Baudracco, président de Bluemind et acteur engagé dans l’open source européen, souligne d’emblée la difficulté de rivaliser avec les grands outils américains, tels qu’Office 365. Pour lui, il ne suffit pas d'afficher sa préférence pour des solutions européennes : il faut accepter quelques ajustements dans les habitudes et tolérer parfois de légères pertes de fonctionnalités. Pierre Baudracco insiste sur la nécessité d'une réelle prise de conscience et de soutien politique, regrettant au passage l’inefficacité d'initiatives telles que celles portées par l'ADINUM, jugées insuffisamment adaptées aux utilisateurs finaux. Pour lui, la commande publique doit mieux valoriser les petites entreprises, suivant un modèle similaire au « Small Business Act » américain, afin de renforcer l’écosystème européen.
Élodie Baudras, avocate associée spécialiste du numérique et de la propriété intellectuelle chez Morvilliers Sentenac & Associés, apporte un éclairage juridique essentiel. Elle interroge sur l'existence même d'une définition claire de la souveraineté numérique en droit français ou européen. Elle met en avant les enjeux complexes des relations transatlantiques et insiste sur le rôle stratégique des contrats commerciaux, qui peuvent devenir de véritables leviers d’action pour préserver la souveraineté numérique des entreprises européennes.
De son côté, Nadine Bertin-Akermann, responsable France d’Innovaphone, expose clairement la stratégie de son entreprise en matière d’indépendance technologique. Pour elle, garantir la souveraineté numérique passe par la maîtrise totale des infrastructures et des données, exclusivement hébergées en Europe, voire en France. Innovaphone revendique ainsi une chaîne technologique entièrement contrôlée en interne, respectant rigoureusement les exigences du RGPD, tout en évitant toute dépendance vis-à-vis de fournisseurs extra-européens. Elle insiste sur l'importance d’une coopération étroite avec les intégrateurs et les MSP, qui doivent disposer d’outils performants pour construire des offres souveraines et attractives pour leurs clients. Face à la concurrence omniprésente des géants américains, Nadine Bertin-Akermann plaide pour une approche pragmatique et transparente, convaincue que la souveraineté numérique devient un critère de choix essentiel pour les entreprises, bien au-delà d’une simple posture marketing.
Ainsi, cette table ronde révèle non seulement les nombreux défis à relever mais surtout la nécessité d’une mobilisation collective des acteurs économiques, juridiques et politiques afin de garantir une souveraineté numérique efficace et crédible.